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Le bouddhisme : une philosophie du bonheur ?
Rédigé par Philippe Granarolo | Samedi 4 Janvier 2014
Même s’il est un peu mieux connu aujourd’hui qu’au temps de sa vulgarisation « New Age » qui le vit se répandre aux États-Unis (un peu moins en Europe) dans les années 1960-1970, le bouddhisme demeure une énigme pour la majorité des Occidentaux. On imagine trop souvent que le pivot de ce qu’on hésite à qualifier (religion ? sagesse ? philosophie ?) est la croyance en la réincarnation. Or une connaissance ne serait-ce qu’approximative du bouddhisme devrait conduire les tenants de ce fantasme à se demander ce qui peut bien se réincarner quand le « Soi » ou l’âme sont privés de toute consistance.
On sera donc reconnaissant à Philippe Cornu de nous livrer, dans un ouvrage érudit procédant par questions et réponses, tous les éléments permettant de briser une à une les images d’Épinal dans lesquelles on enferme encore trop volontiers le bouddhisme. Si le but du livre est pédagogique, amenant le lecteur à prendre conscience de la complexité du bouddhisme, l’objectif est incontestablement rempli. Mais si le but est de rendre séduisante cette sagesse, est-il atteint par l’auteur, dont les développements très techniques risquent de rebuter ceux qui viendraient seulement chercher dans ce livre une vulgarisation de qualité ? Il est permis de se le demander.
Le bouddhisme : une philosophie du bonheur ?
Les étapes d’une rencontre
Probablement connu de l’Antiquité gréco-romaine, ainsi que l’avait montré Roger-Pol Droit dans un ouvrage qui a marqué les esprits (L’Oubli de l’Inde, Paris, Le Seuil, collection « Points-Essais », 2004), le bouddhisme a été oublié de l’Occident durant presque deux millénaires, ne resurgissant qu’au XIXe siècle, quand nos philologues s’attelèrent à la tâche de traduire les textes de l’Inde ancienne. Ce travail indispensable permit à Schopenhauer, à Edgar Quinet, à Ernest Renan et à bien d’autres de découvrir cette sagesse, et ils furent tous fascinés à des degrés divers par une doctrine que notre continent redécouvrait au moment même où le christianisme commençait à présenter des signes de faiblesse.
Mais il fallut attendre les années 1960 pour que l’une des formes de bouddhisme (très minoritaire en Orient), le bouddhisme zen, préoccupe sérieusement notre civilisation, Alan Watts ouvrant un chemin sur lequel allaient s’engager ses innombrables successeurs. L’invasion chinoise du Tibet et le prestige du Dalaï-lama contribuèrent à rendre très attractive une forme encore plus minoritaire en Orient, le bouddhisme tibétain. Mes contemporains se souviennent comme moi avec quelle émotion ils découvrirent cette forme de bouddhisme à travers les superbes émissions télévisées que lui consacra le regretté Arnaud Desjardins (1925-2011), à la fin des années 1960.
Un bouddhisme sans monachisme
Établir la liste de ce qui distingue le bouddhisme oriental de ses adaptations occidentales serait une tâche infinie. Mais Philippe Cornu met à juste titre en exergue l’écart le plus décisif, celui de la part réservé au monachisme dans les deux formes de bouddhisme.
Dans toutes les formes orientales, les moines bouddhistes représentent bien plus que l’élite des pratiquants. Ils sont les maîtres auprès desquels on vient demander conseil, ils sont la preuve vivante du haut degré de sérénité qu’une pratique assidue et rigoureuse permet d’atteindre.
En Occident, aucun monachisme bouddhiste n’a réussi à s’implanter véritablement à ce jour. Dans les centres qui se sont répandus, ce sont des maîtres venus d’Orient qui enseignent la pratique. Quant aux moines bouddhistes d’origine occidentale, dont Matthieu Ricard est sans doute l’exemple le plus médiatisé, ils vivent l’essentiel de leur existence dans des monastères situés en Orient, et non en Europe ou aux États-Unis.
Les constantes
Le plus grand mérite de l’ouvrage de Philippe Cornu est d’établir la liste des constantes permettant d’affirmer qu’en dépit des formes multiples qu’il a prises historiquement, le bouddhisme a conservé une unité fondamentale.
Au fil des pages, on apprend à se défaire des caricatures si répandues concernant le « karman » (plus souvent nommé « karma »), qui n’est pas le destin, mais l’ensemble des conséquences logiques de nos pensées et de nos actes, conséquences auxquelles il est toujours possible d’échapper par un travail spirituel. Même chose pour le « Samsara », le monde de l’apparence où règne la souffrance.
Le bouddhisme serait-il alors un dualisme nous invitant à fuir ce monde pour une autre dimension ? Non, il s’agit d’un changement de regard, fort bien décrit par ces mots : « La hiérophanie (terme créé par Mircea Eliade et utilisé depuis en philosophie des religions, ndlr), qui désigne la manifestation du sacré, consiste non pas en l’irruption d’une puissance numineuse extérieure dans le domaine profane, mais s’exprime dans un regard neuf sur ce qui nous entoure et sur nous-même, la vision pure » (p. 71). L’auteur nous initie également au difficile concept de « vacuité » (p. 102 et suiv..) et à bien d’autres dimensions encore que ce bref compte rendu ne saurait parcourir.
Orthopraxie et limites du discours
Le bouddhisme n’est pas étranger à tout intellectualisme, de multiples écoles ayant mené pendant des siècles des débats et des controverses qui ne sont pas si éloignés que cela de nos confrontations philosophiques et théologiques. L’auteur ne saurait cependant contester qu’il est avant tout une « orthopraxie », une pratique rigoureuse et très contraignante, conduisant à une expérience qu’il faut vivre individuellement et qui n’est que très partiellement communicable. D’où une difficulté qui ne me semble guère résolue.
Philippe Cornu, quand il évoque cette « orthopraxie », signale qu’il convient de s’engager résolument dans l’une des formes du bouddhisme, et que « papillonner » de l’une à l’autre ne saurait mener à rien. Mais, en ce cas, un ouvrage présentant de façon aussi fouillée les différentes formes de bouddhisme a-t-il la moindre chance de pousser le lecteur vers la pratique ?
L’avenir du bouddhisme
Rien n’est plus inactuel que le bouddhisme, qui s’oppose à l’hédonisme des consommateurs que nous sommes et qui ne saurait séduire réellement des hommes devenus étrangers à toute spiritualité. Le succès apparent du bouddhisme est donc éminemment paradoxal.
Peut-il se développer en nous reconduisant sur la voie d’une spiritualité oubliée ? Ou peut-il, comme l’envisageait Nietzsche il y a plus d’un siècle, prendre la forme d’un « bouddhisme européen », cette « religion pour hommes tardifs, pour des races débonnaires, douces, devenues hyper-cérébrales, qui ressentent trop aisément la souffrance » (Nietzsche, L’Antéchrist, § 22, Œuvres philosophiques complètes, Paris, Gallimard, 1974, tome VIII, p. 179). Il est sans doute beaucoup trop tôt pour répondre à une telle question.
Philippe Cornu, Le Bouddhisme : une philosophie du bonheur ?, Paris, Le Seuil, septembre 2013, 314 pages, 21 €.
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