Au cœur du Village des Pruniers, le petit Lourdes du zen en Dordogne
"Sud Ouest" a poussé les portes du village bouddhiste des Pruniers à Thénac, en Bergeracois. Religieux et laïcs s'y retrouvent en nombre chaque dimanche matin pour y recevoir les enseignements du maître zen Thich Nhat Hanh
À l'entrée du village bouddhiste des Pruniers, à Thénac, une moniale en costume traditionnel agite de larges manches dans l'air. Impossible d'aller plus loin, le parking aménagé à l'ombre des pagodes vietnamiennes et des platanes périgourdins est plein. Depuis l'aurore, les voitures s'y agglutinent, portière contre portière, pare-chocs contre pare-chocs, prenant le risque de s'embourber dans les terres inondées par la pluie tombée la veille en abondance. Les retardataires font le choix d'abandonner négligemment leur véhicule au bord des chemins : tant pis si les roues arrières sont dans le fossé, ils n'ont pas le temps d'aller plus loin. Dans cinq minutes, le grand maître bouddhiste Thich Nhat Hanh, dit Thây (lire ci-contre), entrera en scène pour deux heures de prêche zen.

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Reportage sur village Boudhiste à Thénac. 20140226_photo_IMG_9814© Photo Mazalrey Loïc
Devant les portes vitrées de la salle des Étoiles, dont les dimensions célestes rappellent celles des cathédrales gothiques, les paires de chaussures se comptent par centaines. À l'intérieur, une foule compacte se prépare à communier en chaussettes au rythme des enseignements du sage fondateur du village des Pruniers. Agenouillé sur l'estrade, Thaï, le militant de la paix, dont le nom a été proposé pour le Nobel en 1967 par le pasteur Martin Luther King, a fermé les yeux.
La « pleine conscience »
Dehors, la pluie cogne sur les vitres, mais la statue de cire est imperturbable. Soudain, l'écho d'un gong, lent et profond. Le chant d'une femme, doux et enveloppant, monte au-dessous des tuniques sombres et des silhouettes au vestiaire plus urbain. Thich Nhat Han, 86 ans, se redresse et mime des gestes de yoga. Rotations du bassin, génuflexions, ouverture des bras, la salle reprend les mouvements déliés de celui dont la parole se répand depuis plus de 50 ans dans le monde entier.
Reportage sur village Boudhiste à Thénac. 20140226_photo_IMG_9780© Photo Mazalrey Loïc
« Je suis un peu rouillée, ça me fait toujours du bien cette petite parenthèse sportive, sourit Nathalie, une moniale suisse de 65 ans qui s'applique à rester dans le rythme, malgré des douleurs récurrentes au genou droit. On dit souvent que les religieux sont rigides, au sens propre comme au sens figuré, mais ce n'est pas vrai pour les adeptes de la religion bouddhiste. Il n'y a pas si longtemps, en respirant bien, j'arrivais à faire le grand écart. » Autour de la sexagénaire, les plus détendus - ou les moins bien réveillés, c'est selon - se laissent volontiers aller à des bâillements sonores, mais Thây ne s'en offusque pas. Le maître bouddhiste y voit là au contraire un signe constructif pour accéder à « la pleine conscience », théorie révolutionnaire qui lui a valu de se faire connaître et reconnaître dans le monde bouddhiste.
« En dehors du temps »
Mi-ascète, mi-épicurien, Thây invite ses semblables à prendre conscience des gestes accomplis. Respirer, être là, mesurer au plus profond de son être les répercussions de ses actes et de ses pensées. « La pleine conscience, c'est respirer, en pensant qu'on respire, marcher en pensant qu'on marche, manger en pensant à ce que l'on mange, glisse Thich Nhat Hanh. C'est la meilleure façon de reconnecter le corps et l'esprit. » Entre une blague sur Sarkozy, saluée par des rires pudiques dans l'auditoire, et une réflexion sur l'Éducation nationale, Thây suggère même de faire sonner l'alarme de son téléphone toutes les heures pour rapprocher le corps et l'esprit. « De cette manière, on s'oblige à se tenir quelques secondes en dehors du temps », explicite le maître bouddhiste.
Reportage sur village Boudhiste à Thénac. 20140226_photo_IMG_9785© Photo Mazalrey Loïc
En parlant, l'ancien étudiant de la prestigieuse université de Princeton, aux États-Unis, est passé au tableau pour exécuter sa démonstration. Feutre en main, le voilà qui dessine une fleur de lotus pour évoquer les différents stades de la connaissance de soi. Dans sa bouche, Freud se mélange à Bouddha, le « ça », le « moi », « le surmoi » sont revisités à la sauce zen et prennent au passage des noms exotiques. « La religion bouddhiste considère qu'il y a encore une étape supérieure au-dessus du surmoi, le non-soi. Nous appartenons tous à un collectif qui nous dépasse tous en tant qu'individus », avance en substance Thich Nhat Hanh.
Reportage sur village Boudhiste à Thénac. 20140226_photo_IMG_9784© Photo Mazalrey Loïc
Casque sur la tête (l'enseignement de Thây est délivré en plusieurs langues dont l'anglais, le français et le chinois), l'auditoire note scrupuleusement les préceptes du maître bouddhiste. Cette matière, offerte, servira à nourrir le quotidien de chacun, moine, moniale ou laïc. « Moi, je consigne la moindre phrase, le moindre dessin dans un petit carnet que j'emmène toujours avec moi, confie Carole, 41 ans, divorcée et mère de trois enfants établie dans la région de Bergerac. Si l'on veut progresser dans la philosophie zen, il faut pratiquer le plus souvent possible. Personnellement, une fois rentrée chez moi, je relis mes notes tous les soirs. »
Une marche méditative
« Reconnaissante » envers celui dont les textes l'ont aidée à « sortir de la dépression », Carole ne sacrifie à aucune des grand-messes célébrées par Thich Nhat Hanh. « Pour tout vous dire, j'organise même ma vie en fonction des enseignements », glisse-t-elle en chuchotant, soucieuse de laisser ses voisins s'extraire doucement de leur méditation. Sur l'estrade, Thây s'est relevé, la cérémonie est terminée. Alors que le maître quitte la salle doucement, fatigué par le poids des années, une voix de femme annonce au micro la suite du programme. Religieux et laïcs ont rendez-vous à l'extérieur de la salle pour une marche méditative.
Reportage sur village Boudhiste à Thénac. 20140226_photo_IMG_9869© Photo Mazalrey Loïc
La mer de tuniques sombres se retire et s'évanouit dans la nature, le long des chemins et des sentiers qui entourent le village bouddhiste. Les plus bavards retrouvent la parole, plaisantent entre eux, sans ralentir leur marche. Soudain, au milieu de sa phrase, un jeune moine au sourire contagieux s'interrompt. Au loin, la cloche a retenti. Passe un léger souffle de vent, et la conversation reprend. En l'espace de quelques secondes, le centre des Pruniers s'est connecté au monde.
Reportage sur village Boudhiste à Thénac. 20140226_photo_IMG_9825© Photo Mazalrey Loïc
"Sud Ouest" a poussé les portes du village bouddhiste des Pruniers à Thénac, en Bergeracois. Religieux et laïcs s'y retrouvent en nombre chaque dimanche matin pour y recevoir les enseignements du maître zen Thich Nhat Hanh
À l'entrée du village bouddhiste des Pruniers, à Thénac, une moniale en costume traditionnel agite de larges manches dans l'air. Impossible d'aller plus loin, le parking aménagé à l'ombre des pagodes vietnamiennes et des platanes périgourdins est plein. Depuis l'aurore, les voitures s'y agglutinent, portière contre portière, pare-chocs contre pare-chocs, prenant le risque de s'embourber dans les terres inondées par la pluie tombée la veille en abondance. Les retardataires font le choix d'abandonner négligemment leur véhicule au bord des chemins : tant pis si les roues arrières sont dans le fossé, ils n'ont pas le temps d'aller plus loin. Dans cinq minutes, le grand maître bouddhiste Thich Nhat Hanh, dit Thây (lire ci-contre), entrera en scène pour deux heures de prêche zen.

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Devant les portes vitrées de la salle des Étoiles, dont les dimensions célestes rappellent celles des cathédrales gothiques, les paires de chaussures se comptent par centaines. À l'intérieur, une foule compacte se prépare à communier en chaussettes au rythme des enseignements du sage fondateur du village des Pruniers. Agenouillé sur l'estrade, Thaï, le militant de la paix, dont le nom a été proposé pour le Nobel en 1967 par le pasteur Martin Luther King, a fermé les yeux.
La « pleine conscience »
Dehors, la pluie cogne sur les vitres, mais la statue de cire est imperturbable. Soudain, l'écho d'un gong, lent et profond. Le chant d'une femme, doux et enveloppant, monte au-dessous des tuniques sombres et des silhouettes au vestiaire plus urbain. Thich Nhat Han, 86 ans, se redresse et mime des gestes de yoga. Rotations du bassin, génuflexions, ouverture des bras, la salle reprend les mouvements déliés de celui dont la parole se répand depuis plus de 50 ans dans le monde entier.

« Je suis un peu rouillée, ça me fait toujours du bien cette petite parenthèse sportive, sourit Nathalie, une moniale suisse de 65 ans qui s'applique à rester dans le rythme, malgré des douleurs récurrentes au genou droit. On dit souvent que les religieux sont rigides, au sens propre comme au sens figuré, mais ce n'est pas vrai pour les adeptes de la religion bouddhiste. Il n'y a pas si longtemps, en respirant bien, j'arrivais à faire le grand écart. » Autour de la sexagénaire, les plus détendus - ou les moins bien réveillés, c'est selon - se laissent volontiers aller à des bâillements sonores, mais Thây ne s'en offusque pas. Le maître bouddhiste y voit là au contraire un signe constructif pour accéder à « la pleine conscience », théorie révolutionnaire qui lui a valu de se faire connaître et reconnaître dans le monde bouddhiste.
« En dehors du temps »
Mi-ascète, mi-épicurien, Thây invite ses semblables à prendre conscience des gestes accomplis. Respirer, être là, mesurer au plus profond de son être les répercussions de ses actes et de ses pensées. « La pleine conscience, c'est respirer, en pensant qu'on respire, marcher en pensant qu'on marche, manger en pensant à ce que l'on mange, glisse Thich Nhat Hanh. C'est la meilleure façon de reconnecter le corps et l'esprit. » Entre une blague sur Sarkozy, saluée par des rires pudiques dans l'auditoire, et une réflexion sur l'Éducation nationale, Thây suggère même de faire sonner l'alarme de son téléphone toutes les heures pour rapprocher le corps et l'esprit. « De cette manière, on s'oblige à se tenir quelques secondes en dehors du temps », explicite le maître bouddhiste.

En parlant, l'ancien étudiant de la prestigieuse université de Princeton, aux États-Unis, est passé au tableau pour exécuter sa démonstration. Feutre en main, le voilà qui dessine une fleur de lotus pour évoquer les différents stades de la connaissance de soi. Dans sa bouche, Freud se mélange à Bouddha, le « ça », le « moi », « le surmoi » sont revisités à la sauce zen et prennent au passage des noms exotiques. « La religion bouddhiste considère qu'il y a encore une étape supérieure au-dessus du surmoi, le non-soi. Nous appartenons tous à un collectif qui nous dépasse tous en tant qu'individus », avance en substance Thich Nhat Hanh.

Casque sur la tête (l'enseignement de Thây est délivré en plusieurs langues dont l'anglais, le français et le chinois), l'auditoire note scrupuleusement les préceptes du maître bouddhiste. Cette matière, offerte, servira à nourrir le quotidien de chacun, moine, moniale ou laïc. « Moi, je consigne la moindre phrase, le moindre dessin dans un petit carnet que j'emmène toujours avec moi, confie Carole, 41 ans, divorcée et mère de trois enfants établie dans la région de Bergerac. Si l'on veut progresser dans la philosophie zen, il faut pratiquer le plus souvent possible. Personnellement, une fois rentrée chez moi, je relis mes notes tous les soirs. »
Une marche méditative
« Reconnaissante » envers celui dont les textes l'ont aidée à « sortir de la dépression », Carole ne sacrifie à aucune des grand-messes célébrées par Thich Nhat Hanh. « Pour tout vous dire, j'organise même ma vie en fonction des enseignements », glisse-t-elle en chuchotant, soucieuse de laisser ses voisins s'extraire doucement de leur méditation. Sur l'estrade, Thây s'est relevé, la cérémonie est terminée. Alors que le maître quitte la salle doucement, fatigué par le poids des années, une voix de femme annonce au micro la suite du programme. Religieux et laïcs ont rendez-vous à l'extérieur de la salle pour une marche méditative.

La mer de tuniques sombres se retire et s'évanouit dans la nature, le long des chemins et des sentiers qui entourent le village bouddhiste. Les plus bavards retrouvent la parole, plaisantent entre eux, sans ralentir leur marche. Soudain, au milieu de sa phrase, un jeune moine au sourire contagieux s'interrompt. Au loin, la cloche a retenti. Passe un léger souffle de vent, et la conversation reprend. En l'espace de quelques secondes, le centre des Pruniers s'est connecté au monde.

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