
* L'Article du Journal "Libération" :
"Le dalaï-lama en visite France / Mao, la CIA et moi...
Interview complète réalisée par Romain Franklin
pour Liberation.com Le lundi 25 septembre 2000
(Le Tibet en bref Capitale: Lhassa Superficie: 2,5 millions de km2, selon les Tibétains; 1,2, selon Pékin. Population: 6 millions, selon les Tibétains; 2,2, selon Pékin. Religion: bouddhisme tantrique. Depuis 1578, le chef spirituel et temporel du Tibet est le dalaï-lama. Son gouvernement en exil est installé à Dharamsala (Inde) depuis 1959.)
Vous aviez 16 ans quand la Chine a commencé à envahir le Tibet. Le Parlement tibétain, le kashag (cabinet), mit fin à la régence et vous confia alors les pleins pouvoirs et le soin de décider de la marche à suivre. Que se passe-t-il dans l'esprit d'un jeune garçon de seize ans sur les épaules duquel pèse une telle responsabilité ?
La confusion... (Rire) je n'avais pas d'expérience, et encore moins l'expérience de négociations avec une grande puissance. Il n'y avait personne non plus (dans mon entourage) qui puisse me conseiller dans le domaine des relations internationales. C'était un moment très difficile pour moi. D'autant que nous décidâmes d'approcher quatre pays, la Grande Bretagne, les Etats Unis, le Népal, l'Inde, et préparâmes l'envoi de délégations devant se rendre dans ces quatre capitales, mais au dernier moment, tous refusèrent de les recevoir.
Comment preniez-vous vos décisions ?
En consultant le kashag, notamment deux premiers ministres bien qu'ils ignoraient tout du monde moderne et des rapports entre les pays. Mais je pouvais leur faire totalement confiance car c'étaient des personnes sincères. J'ai également consulté mon tuteur et le régent.
Vous avez eu dans les années 50 de longues conversations en tête à tête avec Mao Zedong, que vous décrivez dans votre autobiographie (publiée en 1962) comme quelqu'un de cultivé et courtois. Vous dites avoir eu la certitude qu'il n'imposerait jamais le communisme par la force au Tibet, mais qu'en revanche le premier ministre Zhou Enlai était l'instigateur de la répression. Etes-vous toujours du même avis ?
Non (rire) j'ai changé d'opinion a ce sujet. Les Chinois eux-mêmes ont fourni de nouvelles informations et j'ai acquis davantage d'expérience. Le président Mao était en fait quelqu'un qui ne tolérait pas la moindre critique. En 1957, je lui ai envoyé deux lettres traitant de la situation au Tibet. Mais il ne m'a pas répondu. Mao était un grand révolutionnaire, il n'y a aucun doute là-dessus. A l'origine c'était un révolutionnaire sincère et déterminé à mettre en œuvres certains idéaux. Mais plus tard il s'est laissé corrompre par le pouvoir, et les pouvoirs totalitaires peuvent corrompre très facilement.
Etiez-vous trop jeune à l'époque pour pouvoir le juger ?
Même si je l'avais mieux jugé, je n'avais pas d'autre choix que de faire ce que j'ai fait. Mieux valait peut-être pour moi à l'époque ignorer quelles étaient ses intentions réelles. Comme je croyais ce qu'il me disait, je me sens plus en paix avec moi-même (rire).
Il vous impressionnait beaucoup n'est-ce pas ?
Oui. Vous savez il avait cette manière de se conduire très particulière lors des meetings, et lors des entretiens privés que j'ai eus avec lui. Il n'y avait que lui et moi et un seul interprète. Il dégageait une grande assurance en lui, et il me parlait très lentement en pesant chaque mot, allant droit au but. Le contraire de Zhou Enlai, qui était très suave.
Pendant neuf années après l'invasion du Tibet, vous avez choisi non pas de fuir, mais de collaborer sous la contrainte, en vous efforçant de minimiser les actions répressives de la Chine. Rétrospectivement, pensez-vous avoir été naïf ou n'y avait-il pas d'autre choix ?
En 1951, j'aurais pu m'échapper en Inde sans difficultés, d'autant que je me trouvais déjà à la frontière. En 1956-57, j'ai passé quelques mois en Inde et j'aurais pu y demeurer. Beaucoup dans mon entourage officiel me conseillaient de le faire, ainsi que deux de mes frères. Mais j'ai suivi le conseil (du premier ministre indien) Nehru , je suis rentré, et je continue de penser que c'était la bonne décision. J'ai ensuite tenté d'apaiser la tension avec la Chine toujours en suivant les conseils de Nehru. J'ai essayé, mais échoué. Pour finir, je n'ai pas pu faire autrement que de fuir en 1959. Mais du fait que j'avais suivi ses conseils, Nehru m'a accueilli de manière très chaleureuse en 1959. Aux yeux du monde aussi, mes tentatives ont eu je pense un impact très positif. Si j'étais parti dès 1956, on aurait pu penser que j'avais choisi la voie de la facilité. Quand je suis parti en 1959, c'était sous les bombardements (chinois), beaucoup de gens sont morts, et le courant de sympathie de par le monde a naturellement été beaucoup plus fort.
Concernant toute cette période vous n'avez aucun regret ?
Non.
Quand avez-vous réalisé quelles étaient les intentions de la Chine à l'égard du Tibet : destruction de la religion et répression ?
Très tard. C'est seulement après 1959 que mes idées sont devenues claire à ce sujet. L'un de mes meilleurs conseillers n'est arrivé à la conclusion que j'avais eu raison de fuir Lhassa qu'au moment de la Révolution culturelle, vers 1966-67 . J'ai suivi le même cheminement du doute : longtemps j'ai cru que peut-être que tout ce qui arrivait était le résultat de quiproquos entre nous et la Chine. Le soulèvement armé des Tibétains dans la région du Kham (1956, NDLR), pour moi, pouvait fort bien n'avoir été provoqué par zèle répressif d'un officiel chinois local, et je pensais que Pékin n'étais peut-être pas au courant. Il y avait toujours un doute dans mon esprit.
Votre grand frère Gyalo Thondup avait établi des contacts avec la CIA américaine dès 1951, et en 1957 organisa l'entrainement à Guam de guerilleros tibétains, qui étaient ensuite parachutés au Tibet par les Etats-Unis. Ne jouiiez-vous pas à l'époque une sorte de double-jeu ?
Les contacts pris par mon frère avec la CIA dès 1951 étaient secrets, et je l'ignorais moi-même. Lorsque je me suis rendu en Inde en 1956, j'ai senti qu'il avait ce genre de contacts avec la CIA, mais tout celà demeurait secret. Je n'avais pas d'informateur. Je pense que mon frère m'avait délibérément laissé dans l'ignorance. En 1958 toutefois, tout m'est apparu très clairement après qu'un officiel tibétain m'eut mis au courant. Je n'ai néanmoins rencontré de personnes qui avaient été entrainées (par la CIA) qu'après ma fuite en 1959. La guerrila tibétaine basée au Mustang à partir de 1960 était également commandée par mon frère avec l'aide de la CIA. Je ne vous cache pas qu'il y avait des frictions à ce sujet entre lui et le gouvernement de Dharamsala. Des fonctionnaires de mon gouvernement ont tenté d'arrêter des campagnes de recrutement de guerilleros qui avaient lieu au Sikkim et à Darjeeling. Mais je ne savais à l'époque que la moitié de ce qui se passait. Mais laissez-moi éclaircir ce point : en 1959, un guerilleros qui avait été formé par la CIA m'a déclaré de butte en blanc que toute ma fuite avait été planifiée par la CIA ! J'étais vraiment choqué ! Je savais bien sûr déjà que des guerilleros Khampas entrainés (par la CIA) avaient fait un travail de nettoyage dans le sud du Tibet, ce qui a certainement contribué à rendre ma fuite possible. Mais c'est tout : c'est nous et non la CIA qui avons pris la décision de nous échapper. La CIA aime bien se montrer en instigateur, mais ce n'est pas la vérité. De même, la CIA n'est venue que par la suite aider le soulèvement des Khampas, qui avait commencé spontanément début 1956.
» Demande d'aide régulière à une famille népalaise.
» Amitābha: Le Grand Soutra de la Vie Infinie
» Qu’est-ce que la prise de refuge pour vous ?
» Jamgon Kongtrul Lodrö Chökyi Nyima quitte ses fonctions ...
» Les lumineuses leçons d'Alexandra David Néel
» "BOUDDHISME ET NEUROSCIENCES"
» Merci de m'accepter sur votre forum
» Qu'est-ce que je viens faire ici
» Nouveau sur votre forum
» Les voeux de Bodhisattva
» Boîte aux lettres " Besoin de prières"
» C’est quoi être hypersensible ?
» Bonjour à tout le monde-Nathalie
» Je ne suis pas certain qu'il aie été juste de verrouiller le sujet je ne suis pas bouddhiste
» Les "mauvaises fréquentations"
» Effacer les fautes du passé
» Nouveau membre ainsi que nouveau dans le bouddhisme.
» Vers une écologie intérieure - Invité : Karma Trinlay Rimpoché
» Comment ne pas se perdre dans les bardos après la mort physique?
» Yogas tibétains du rêve et du sommeil
» Quelle attitude face au Dharma de Bouddha - Invité : Roland Yuno Rech
» Donne, donne donne un peu de toi ....
» La nature de Bouddha en nous - Invité : Marc de Smedt
» Un trésor de bénédictions - Invité : Jigmé Thrinlé Gyatso
» Emission radio France sur Alexandra-David-Néel
» Syndrome du cœur brisé, ou Tako Tsubo,
» Le Parfum de la Lumière (anthologie)
» Des arbres , pour l'Arbre .
» Enseignements sur le Gyud Lama et le Bodhicharyavatara
» Un Pèlerin du 21e siècle ...
» Vivre léger ( Wilfred Thesiger )
» Je suis toujours là malgré une année spéciale
» Habiter le moment présent 1/2 et 2/2
» La joie et le bouddhisme zen
» Jour de ROUE important dans le calendrier Bouddhiste
» :-) :-) Tantra KalaChakra :-) :-) suite et fin
» Le Dharma expliqué aux enfants
» La vie d’ermite au sein du bouddhisme 1 et 2/2
» Les longues retraites dans le vajrayana
» Le vrai secret du bonheur ,c'est l'amour .
» Consolation avec Christophe André
» question pour 21 aspects de tara
» :-) :-) Tantra KalaChakra :-) :-)
» Y'aurait t'il une technique de méditation ?
» Halte aux voleurs de Bonheur !
» TROUBLE BIPOLAIRE TYPE 1 ET PRATIQUE
» Hard rock Français qui voit la méditation d'un oeil sympathique
» Moi et ma douleur / Moi et ma libération
» Panique et Joie de vivre je vais bien mais ?
» Toutes mes excuses les plus sincéres
» Théorie positivie du moment présent pour une fois
» L'Arbre des Refuges: Les Créateurs et Modérateurs du Forum
» Le Cercle d'Eveil, Année 2022
» Cinéma du Bhoutan ... Lunana, a yack in the classroom
» Notre ciel nocturne , menacé par l'assaut de satellites
» BUDHA PURNIMA , VESAK , ce 16 mai 2022
» Sourire et sourires.......
» Kundun un film sur l'enfance et la vie du Dalaï jusqu'à sa fuite vers l'Inde.
» Exposition Hymne à la Beauté , de Matthieu Ricard
» La force des vœux dans la tradition zen
» Théorie du genre / gender studies
» C'est un plaisir d'être parmi vous.
» en cheminement vers la sensnation constante pour ne faire qu'Un avec l'Etre
» L'oeuf qui ne tue pas la poule
» Le jeûne est au corps ce que la méditation est à l’esprit
» Maintenir notre pratique dans la bousculade du quotidien
» Samadhi film 1/3 - Maya , l'illusion de soi
» le pouvoir du moment présent - Eckhart Tolle
» Bouddhisme et Hindouisme 1/2 et 2/2.
» Présentation..............................................................................
» Citation d' Ernie Lapointe - Lakota - Sagesse amérindienne
» Les ultracrépidariens : des personnes qui donnent leur avis sans avoir de connaissances sur le sujet.
» complètement perdu suite à une illumination
» La Bonne Nouvelle du Salut