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De plus en plus de psychiatres et de médecins font appel aux techniques de méditation, au coeur de la pratique bouddhiste, pour aider les malades à vaincre une dépression, supporter la douleur ou éviter une rechute.
Sophie Coignard
«La souffrance est partout, et la souffrance n’est pas désirable. » Voilà, en très, très résumé, le constat de base qui a présidé au mariage des sciences cognitives et du bouddhisme. Que ce soit à Boston, à Toronto, à Genève, à Maastricht ou même à Châteauroux, la méditation sous diverses formes a été adoptée par des psychiatres, mais aussi par des médecins confrontés à la douleur physique et morale de patients atteints de graves maladies. Le succès sort aujourd’hui cette étrange alliance de la marginalité dans nombre de pays, mais pas en France, particulièrement à la traîne. La patrie de Descartes serait-elle rétive à la spiritualité venue d’Asie ?
Pas entièrement. Christophe André, psychiatre à l’hôpital Sainte-Anne à Paris, a introduit la méditation dans sa pratique pour prévenir les rechutes dépressives. « Il s’agit, explique-t-il, d’apprendre à garder son esprit ici et maintenant. Au début, c’est très difficile, car les pensées basculent dans l’anticipation, le jugement de valeur ou l’introspection. Or il faut apprendre à ne pas laisser s’enchaîner un cycle de pensées. C’est un outil assez troublant mais efficace, qui permet non pas de supprimer les pensées négatives, mais de les regarder et de les arrêter. » Claude Penet, psychiatre à Châteauroux, a pour sa part commencé à pratiquer la méditation dans une démarche de recherche personnelle avant d’en proposer les techniques à ses patients : « Je ne m’étends pas trop sur l’aspect méditation bouddhiste, dit-il. Car la seule chose qu’ils demandent, c’est l’apprentissage d’exercices qui leur permettent de maîtriser leurs émotions négatives. »
En tout cas, il ne s’agit ni d’une mode universitaire ni d’une toquade de quelques leaders d’opinion. Les grands pionniers viennent des Etats-Unis et ont démarré il y a près de trente ans. Mais, aujourd’hui, les progrès de l’imagerie médicale ont permis de montrer de manière certaine que la méditation modifie le fonctionnement du cerveau. Mieux : les moines tibétains, par exemple, présentent des particularités intrigantes lorsque leur cerveau est examiné de près : la zone associée aux émotions comme la compassion manifeste une activité beaucoup plus grande que chez le commun des mortels. C’est l’université de Madison, dans le Wisconsin, qui, sous l’impulsion du psychiatre Richard Davidson, a publié le plus grand nombre d’articles scientifiques sur ce sujet.
Ainsi que l’indique Matthieu Ricard dans un livre à paraître le 6 septembre (« L’Art de la méditation », éditions Nil), « un nombre croissant d’études scientifiques indiquent que la pratique de la méditation à court terme diminue considérablement le stress (dont les effets néfastes sur la santé sont bien établis), l’anxiété, la tendance à la colère (laquelle diminue les chances de survie après une chirurgie cardiaque) et les risques de rechute chez les personnes qui ont vécu au moins deux épisodes de dépression grave. Huit semaines de méditation, à raison de trente minutes par jour, s’accompagnent d’un renforcement notable du système immunitaire [...] ainsi que d’une diminution de la tension artérielle chez les sujets hypertendus et d’une accélération de la guérison du psoriasis. L’étude de l’influence des états mentaux sur la santé, autrefois considérée comme fantaisiste, est donc de plus en plus à l’ordre du jour de la recherche scientifique. » Tous ces effets de la méditation sont documentés dans de grandes revues scientifiques internationales, comme le Journal of the National Cancer Institute ou le Journal of Behavioral Medicine.
Parmi les pionniers, tous américains, le plus impressionnant, par son cursus et par son charisme, est sûrement Jon Kabat-Zinn. Professeur émérite de médecine de l’université du Massachusetts, il a commencé à pratiquer la méditation quand il étudiait au MIT sous la direction du prix Nobel Salvador Luria. Spécialiste de biologie moléculaire, comme Matthieu Ricard, il s’est toujours intéressé au fonctionnement de l’esprit. En 1979, treize ans après ses premiers pas de méditant, il souhaite introduire cette pratique bouddhiste pour réduire la souffrance dans les pathologies graves. Peu à peu, il invente la MBSR (Mindfulness-Based Stress Reduction), un programme d’entraînement à la méditation en pleine conscience réalisable en huit semaines. Sa démarche est accueillie très favorablement au sein de l’hôpital : « Mes diplômes représentaient une garantie aux yeux de mes interlocuteurs, se souvient-il. Au début, j’occupais un tout petit espace et faisais mon secrétariat moi-même. On m’envoyait des autres services des personnes souffrant de cancers, de maladies cardio-vasculaires ou de douleurs postopératoires. J’ai développé ce programme en huit semaines et il a eu tant de succès qu’il a fallu que je forme des instructeurs. La plupart ne sont pas médecins. Le prérequis essentiel, en effet, est un engagement profond dans la méditation bouddhiste et une capacité à communiquer son essence universelle à des personnes qui n’ont aucun intérêt particulier pour le bouddhisme mais qui souffrent beaucoup. » A ce jour, 18 000 personnes ont suivi le programme de huit semaines, pratiqué dans plus de 200 hôpitaux. Le recours à la méditation bouddhiste permet de diviser par deux le risque de récidive après deux épisodes dépressifs sévères ou plus.
A l’université de Genève, le docteur en psychologie Lucio Bizzini, chargé du programme sur la dépression, utilise la MBSR ainsi que d’autres techniques proches, comme la MBCT (Mindfulness Based Cognitive Therapy) développée à l’hôpital de Toronto par le docteur Zindel Segal. « La méthode s’applique particulièrement aux dépressifs dits " ruminateurs", explique Lucio Bizzini. Il s’agit d’un programme assez exigeant qui nécessite, au début, une pratique d’une heure par jour, donc un investissement personnel très important. Mais l’objectif en vaut la peine, car les patients atteignent, comme le dit très bien Jon Kabat-Zinn, un instant décisif, celui où ils se trouvent " derrière la cascade", dans un espace où ils peuvent observer leurs pensées sans qu’elles les inondent. » Seul bémol, reconnu par tous, à commencer par Jon Kabat-Zinn : à cause de cet investissement nécessaire, les personnes qui suivent le programme de méditation MBSR sont sûrement les plus motivées, donc les moins susceptibles de rechuter.
Alors que tous ces médecins pratiquent quotidiennement la méditation avec conviction, aucun n’aurait l’idée de se définir comme bouddhiste. Parce que cela ne veut rien dire. « Le dalaï-lama est le seul chef religieux assez ouvert pour déclarer que si un jour la science remet en question un des aspects du bouddhisme il faudra en prendre acte », observe Christophe André. Sa sainteté, en effet, est férue de sciences : « La science et les enseignements de Bouddha nous parlent ensemble de l’unité fondamentale entre toutes les choses. » §
A consulter :
-« Mindfulness : apprivoiser le stress par la pleine conscience », d’Edel Maex, psychiatre à Anvers (de Boeck-Larcier, 2007).
-« Où tu vas, tu es », de Jon Kabat-Zinn (J’ai Lu, 2005). A paraître début 2009, deux autres ouvrages du même auteur : « Au coeur de la tourmente, la pleine conscience » (De Boeck-Larcier) et « Coming to our Senses » (Les Arènes).
-Site de l’association francophone sur la pleine conscience : www.ecsa.ucl.ac.be/mindfulness
Source: http://www.lepoint.fr
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