Souhaits de SS Orgyen Trinley Dorjé pour 2007

Message de Sa Sainteté le 17ème Karmapa au Monastère Tergar adressé aux étrangers/occidentaux à la veille du nouvel an.

Transcription en Anglais par Brady Hogan
Traduction en français avec l’accord de Brady Hogan.

Lorsque j’étais petit et que je vivais au monastère, j’étais impatient d’attendre l’arrivée de la nouvelle année. Je pouvais à peine dormir, peut-être à cause de la possibilité de nouveaux espoirs et de nouvelles aspirations.
Ainsi, pour cette nouvelle année, j’ai aussi un espoir et un souhait : c’est qu’avec la venue de cette nouvelle année je pourrais peut-être marcher sur votre terre, la terre du continent occidental ; marcher sur les mêmes paysages, et ouvrir la porte de votre monde.
C’est mon souhait pour cette nouvelle année.

En contemplant cette année passée, nous pouvons nous rappeler des expériences qui ont été douloureuses et difficiles. Nous nous rappelons aussi de la joie et des expériences heureuses. Ces différentes expériences, qu’elles soient difficiles à surmonter ou joyeuses et plaisantes sont les paysages, les tapisseries de nos vies ; elles ont des ornements pour donner un sens à nos vies. Il est important de se rappeler de ces joies et de ces peines qui ont marquées cette année passée. Les difficultés que l’on a rencontrées, les expériences douloureuses, ne doivent pas être abandonnées, mises de côté, ou ignorées parce que trop douloureuses.
Les difficultés et les défis doivent être utilisés pour façonner nos vies et leur donner un sens.

Personnellement, j’ai été confronté à des difficultés particulières notamment au cours des années 1999 et 2000 (sa fuite du Tibet), comme beaucoup d’entre vous le savent. Ces difficultés et ces défis sont devenus les ornements de ma vie. Sans ceux-ci je serais peut-être resté inconnu ; en fait cette période m’a valu une certaine renommée.

Ainsi, toute difficulté peut être comprise comme une bénédiction cachée, peut orner notre vie, peut entraîner des résultats bénéfiques. Ce qui est pertinent c’est de pouvoir utiliser n’importe quel problème que l’on a rencontré pour un développement plus grand pour l’année à venir. Ainsi, ils deviennent des ornements, la dignité de l’homme est magnifiée, décorée par cet apprentissage. C’est la chose la plus précieuse à accomplir.

Si on ne peut pas, alors au moins, on doit laisser de côté, lâcher prise. N’emportez pas un bagage avec vous dans cette nouvelle année. Entrez avec une nouvelle vie.

En 2006, j’ai fait face à plusieurs défis, notamment celui de la direction du Kagyu Monlam. Cela implique beaucoup de responsabilités, de problèmes et de réflexions. Mais ce soir, tous ces défis, aussi difficiles qu’ils aient pu être, le valent bien car j’y ai fait face pour vous.
Pourquoi être attaché à eux ? Alors, je les ai laissés derrière.

Ce soir je viens l’esprit clair et dispos. J’espère que vous avez aussi l’esprit dispos, afin de décorer et honorer votre vie humaine et au moins ne pas emporter de bagage dans votre vie présente. Nous avons besoin d’espace, alors n’apportez pas de bagage du passé.

Dites « Au revoir » au passé !

Ainsi, ce que nous ne voyons pas c’est que le « Temps » est en train de nous contrôler, que les habitudes nous contrôlent. Le temps ne va pas nous dicter de changement et les habitudes ne doivent pas nous contrôler, mais notre volonté doit nous guider.
Recherchez cette inspiration, cette motivation au changement. Nous utilisons l’occasion de la Nouvelle Année pour qu’elle serve volontairement de véhicule de changement. Nous pouvons changer n’importe quel moment souhaité si nous ne nous laissons pas contrôler par le temps ou par nos habitudes.

Le but principal du Bouddhisme est de discerner notre vue habituelle conditionnée, réaliser que notre vision est conditionnée et fanatique quelle que soit la vue de la réalité que nous ayons.
Les enseignements du Bouddhisme nous aident à nous défaire de ces fixations. Ils nous aident à comprendre nos fixations, notre rigidité, à ne pas développer d’autre vision, puisque nous allons plus loin sur la voie, mais à aller graduellement au-delà de n’importe qu’elle vision, quelle qu’elle soit.

Lorsque nous appliquons le Dharma dans nos vies spirituelles et nos activités quotidiennes, notre attitude est libre de fixation extrême. Lorsque nous vivons nos vies, et sommes face aux défis et aux difficultés, il y a assez de place pour du mouvement, pour que les activités prennent place simplement. Il n’y a pas à être coincé, mais plutôt à commencer à percevoir de l’espace pour l’espoir, pour les possibilités, pour la confiance.

Ainsi, lors de cette soirée spéciale, il est important pour nous de savoir que l’on ne va pas essayer de promouvoir en particulier telle ou telle vision. Nous avons déjà assez de points de vue. Ce dont nous avons besoin, c’est de l’expérience authentique de la paix de l’esprit, la stabilité de l’esprit, le développement de la profondeur, de la capacité, pour la sagesse; qui ne dépend pas du fait de compter depuis combien de temps on a fait ceci ou cela, mais en contemplant tous les jours ce sui se passe dans notre vie. Nous nous entraînons à cette manière de voir, jour après jour, semaine après semaine, mois après mois.
Nous pouvons utiliser l’amour bienveillant, et la compassion ; nous pouvons nous demander ce que nous avons amélioré ? Qu’avons-nous cultivé dans notre vie quotidienne pour que cela apparaisse ? Nous avons besoin de deux choses :

· un bon guide ;
· des exemples de ce qui est sain et qui est à adopter et de ce qui est nuisible auquel on doit renoncer, et notre propre appréciation de ces deux catégories.

Aidez-vous vous-même. Aidez-vous à apprécier, aidez-vous à développer, à ne pas être dépendant sur l’autre pour vous développer, mais à embrasser les lignes de conduite dont vous avez besoin.
Qu’est ce que nous aider nous-mêmes ? C’est nous nourrir trois fois par jour, c’est prendre soins de notre corps trois fois par jour. Trois fois ou pas, nous avons la notion de prendre soin de notre corps. Il y a une notion du « Je » à qui appartiens notre corps ; en réalité, dans cette expérience qui perdure, il n’y a pas de référence à quelque chose de fixe, à un corps ou une autre entité. Pourtant il y a une dépendance, peut-être une conscience, un esprit, une vigilance dont nous faisons l’expérience.
S’il en est ainsi, peut-être avons-nous besoin d’aider cette vigilance, la
nourrir trois fois par jour. Nourrir l’esprit afin d’être fort, d’être confiant, et d’avoir un esprit mature, comme si l’on prenait des vitamines pour le mental. Attraper un rhume physique est inconfortable, mais un attraper un rhume mental est bien pire. Peut-être devrions-nous faire plus attention à notre esprit qu’à notre corps.

En conclusion, j’aimerais dire que j’ai entendu qu’il y avait 1000 d’entre vous qui viennent de l’étranger. Pour moi vous êtes comme 1000 Bouddhas, 1000 Bodhisattvas. En fait, je ne sais pas à quoi un Bouddha ressemble, à quoi les Bouddhas sont supposés ressembler, mais cette fois les Bouddhas ont différentes nuances de cheveux : blond, noir, marron. Il y en a des grands, des petits. Je suis impressionné par toutes les différentes variétés de manifestation des Bouddhas.

Ainsi, vous êtes venu ici et participez sincèrement au Kagyu Monlam. Je me sens fortifié par votre présence. Je me sens renforcé, au point de vouloir faire quelque chose. Je dois faire plus. Alors pour cette force que vous me donnez, j’aimerais tous vous remercier : « Merci ! ».

Dans le passé mes activités ont été dépendantes des autres, d’une connexion, d’un rassemblement de forces. A l’avenir aussi, la force des autres, la réunion des autres dans l’inséparabilité, seront liés à mon action. Vous êtes tous très important pour moi, vous êtes une source de bénéfice, et peut-être que je le suis un peu pour vous. En cette veille, je vous souhaite du plus profond de mon cœur, des souhaits bienveillants pour
votre bien-être et pour que nous restions connectés dans les années à venir. Si l’expérience est heureuse, nous la vivrons ensemble. Si l’expérience est souffrance, nous la vivrons ensemble.

Avec cela je vous souhaite le meilleur de tout. BONNE ANNEE !

Sa Sainteté le 17ème Karmapa Orgyen Trinley Dorjé, le 31 décembre 2006.


Texte magnifique posté six mois après la nouvelle année mais il n'est jamais trop tard, n'est-ce pas... Longue vie au 17ème Karmapa!

je viens seulement de le lire
c'est un très beau texte empli de compassion et de poésie

Karmapa, puisse votre rêve de venir en occident se réaliser