Le Buddha, un pionnier des “droits de l’homme”
En cette fin du sixième siècle avant notre ère, la société brahmanique de l’Inde était depuis longtemps organisée en classes sociales définies héréditairement, les vanna (littéralement “couleurs”) ou castes (du portugais casto, “pur”). Sunîta faisait partie de la caste la plus basse, mais le Buddha, bien qu’originaire de la caste des nobles seigneurs, n’en avait cure ; pour lui, seules comptaient les qualités intérieures et la volonté de progresser de ceux qu’il approchait et qui l’approchaient.
Ainsi, venus de tous les horizons sociaux, hommes et femmes trouvaient auprès du Buddha un frère et un maître qui, bien que venu lui-même d’une des deux classes sociales supérieures, démontrait encore et encore, par ses enseignements et son comportement, que la vraie supériorité d’un être humain ne pouvait pas résider dans ses origines sociales, dans sa puissance ou sa richesse matérielles, mais dans son aptitude à voir le monde avec clairvoyance et bienveillance, et dans sa force à pratiquer la vertu. Cette prise de position sociale du Buddha était fondée sur la prééminence, relativement à toute tradition socio-culturelle quant à l’organisation de la société, du respect par l’individu des règles ou obligations morales (Vasala Sutta [1]).
La notion de qualité était très importante pour le Buddha. Qualité mentale, morale et spirituelle, guidant la qualité des actions commises : un être prouve et développe sa qualité mentale en se développant spirituellement et en accomplissant les règles morales. En se fondant sur cette notion de qualité mentale, on peut surmonter objectivement, plutôt qu’émotionnellement, les préjugés de classe ou de race, et le Buddha ne se faisait pas faute de le rappeler dans ses sermons et ses enseignements (Candâla Sutta [2]).
Sans ostentation mais fermement, et de façon très pédagogique, à chaque fois que l’occasion s’en présentait, le Buddha dénonçait le système des castes. Bien que ce message fût scandaleux pour l’époque (et il l’est toujours en Inde, et même encore plus depuis sa complexification et sa rigidification lors du passage du brahmanisme à l’hindouisme au cours du premier millénaire de notre ère), on l’écoutait respectueusement le plus souvent, du fait de son charisme, de sa vie exemplaire... et de sa redoutable logique. Le Buddha n’aimait pas se lancer dans des joutes verbales, mais lorsque sa participation à celles-ci s’avérait nécessaire il s’en sortait aisément à son avantage grâce à son intelligence aiguë et à son imperturbable sérénité (Ambattha Sutta [3]).
Le Buddha impressionnait ses contemporains par son attitude à la fois ferme et paisible. Même s’il désapprouvait fortement un comportement ou une coutume, jamais, malgré son habileté, il ne tentait de soulever une émotion susceptible d’entraîner une action violente, même en esprit. Pour autant, quand il estimait de son devoir de s’exprimer, face à la stupidité ou l’injustice, il ne se taisait pas, et le Buddha se donna beaucoup de peine pour convaincre ses interlocuteurs du caractère erroné de leurs vues sociales et raciales (les unes et les autres étant intimement liées dans la société de son temps). Nombreux sont les enseignements du Buddha en ce sens, et les débats engagés par lui à ce sujet - ainsi, lorsqu’il déclarait que les variations biologiques au sein de l’espèce humaine étaient minimes (Vâsettha Sutta [4]).
Ceci étant, en ce domaine comme en tous les autres, le Buddha cherchait plus à persuader qu’à convaincre, et encore moins à vaincre (Assallâyana Sutta [5]).
Enfin, le Buddha non seulement s’est attaqué aux préjugés sociaux et raciaux de castes, mais il a également permis la création du premier ordre connu de moniales. Certaines de celles-ci enseignaient aux hommes, et le Buddha ne cachait pas sa haute appréciation de leur intelligence. Une attitude pour le moins extraordinaire quand on se replace dans le contexte culturel, très fortement patriarcal, de la société où il évoluait ! Mais comme on l’a dit, l’homme Gautama lui-même, fondateur de la première religion universelle, était extraordinaire.
Au vu de ce qui précède, on peut très bien considérer le Buddha comme le premier grand maître historique en matière de justice sociale, ou de ce qui, depuis une célèbre déclaration fille de la Révolution française, est désigné de nos jours sous le vocable général de “droits de l’homme”.
Notes et extraits du Sutta-Pitaka :
[1] “Ce n’est pas par sa naissance que l’on est un être inférieur ou supérieur, c’est par ses actes qu’on le devient.” - Vasala Sutta, “Sermon sur l’Inférieur social”, Sutta-Nipâta I, 7, Khuddaka-Nikâya. (lien -> binome2a)
[2] “Un vrai sauvage se reconnaît par cinq défauts. Il ne comprend pas et ne sait pas être déterminé. Il ne pratique pas les vertus. Il se complaît dans les superstitions de toutes sortes, recherchant la magie et les envoûtements. Et il croit en ceux-ci, au lieu de reconnaître les relations psychologiques et physiques de causes à effets. Il préfère flatter de ses dons ceux qui ne le méritent pas, plutôt que d’aider par ses dons les membres de la Congrégation.” - Candâla Sutta, “Sermon sur le Sauvage”, Anguttara-Nikâya V.175 (lien -> binome2b)
[3] “Le noble est au-dessus de tous ceux qui prennent comme référence leur lignée ; mais celui qui est doté de savoir et de vertu, celui-là est supérieur parmi tous les humains comme parmi les dieux.” - Ambattha Sutta, “Sermon à Ambattha”, Dîgha-Nikâya 3 (lien -> binome2c)
[4] “À la différence de la plupart des plantes et des autres animaux, les variations biologiques au sein de l’espèce humaine sont si minimes que l’on peut les considérer comme largement conventionnelles.” - Vâsettha Sutta, “Sermon pour Vâsettha”, in Majjhima-Nikâya 98, et in Sutta-Nipâta III, 9, Khuddaka-Nikâya (lien -> binome2d)
[5] Il est possible à chacun de devenir vertueux et de bonne composition. La pureté effective se définissant par un état d’esprit et des actes réels, elle est accessible à chacun, en dehors de toute contrainte de caste. - Assallâyana Sutta, “Sermon à Assallâyana”, Majjhima-Nikâya 93 (lien -> binome2e)
Source: http://www.buddhaline.net/Le-Buddha-un-pionnier-des-droits
En cette fin du sixième siècle avant notre ère, la société brahmanique de l’Inde était depuis longtemps organisée en classes sociales définies héréditairement, les vanna (littéralement “couleurs”) ou castes (du portugais casto, “pur”). Sunîta faisait partie de la caste la plus basse, mais le Buddha, bien qu’originaire de la caste des nobles seigneurs, n’en avait cure ; pour lui, seules comptaient les qualités intérieures et la volonté de progresser de ceux qu’il approchait et qui l’approchaient.
Ainsi, venus de tous les horizons sociaux, hommes et femmes trouvaient auprès du Buddha un frère et un maître qui, bien que venu lui-même d’une des deux classes sociales supérieures, démontrait encore et encore, par ses enseignements et son comportement, que la vraie supériorité d’un être humain ne pouvait pas résider dans ses origines sociales, dans sa puissance ou sa richesse matérielles, mais dans son aptitude à voir le monde avec clairvoyance et bienveillance, et dans sa force à pratiquer la vertu. Cette prise de position sociale du Buddha était fondée sur la prééminence, relativement à toute tradition socio-culturelle quant à l’organisation de la société, du respect par l’individu des règles ou obligations morales (Vasala Sutta [1]).
La notion de qualité était très importante pour le Buddha. Qualité mentale, morale et spirituelle, guidant la qualité des actions commises : un être prouve et développe sa qualité mentale en se développant spirituellement et en accomplissant les règles morales. En se fondant sur cette notion de qualité mentale, on peut surmonter objectivement, plutôt qu’émotionnellement, les préjugés de classe ou de race, et le Buddha ne se faisait pas faute de le rappeler dans ses sermons et ses enseignements (Candâla Sutta [2]).
Sans ostentation mais fermement, et de façon très pédagogique, à chaque fois que l’occasion s’en présentait, le Buddha dénonçait le système des castes. Bien que ce message fût scandaleux pour l’époque (et il l’est toujours en Inde, et même encore plus depuis sa complexification et sa rigidification lors du passage du brahmanisme à l’hindouisme au cours du premier millénaire de notre ère), on l’écoutait respectueusement le plus souvent, du fait de son charisme, de sa vie exemplaire... et de sa redoutable logique. Le Buddha n’aimait pas se lancer dans des joutes verbales, mais lorsque sa participation à celles-ci s’avérait nécessaire il s’en sortait aisément à son avantage grâce à son intelligence aiguë et à son imperturbable sérénité (Ambattha Sutta [3]).
Le Buddha impressionnait ses contemporains par son attitude à la fois ferme et paisible. Même s’il désapprouvait fortement un comportement ou une coutume, jamais, malgré son habileté, il ne tentait de soulever une émotion susceptible d’entraîner une action violente, même en esprit. Pour autant, quand il estimait de son devoir de s’exprimer, face à la stupidité ou l’injustice, il ne se taisait pas, et le Buddha se donna beaucoup de peine pour convaincre ses interlocuteurs du caractère erroné de leurs vues sociales et raciales (les unes et les autres étant intimement liées dans la société de son temps). Nombreux sont les enseignements du Buddha en ce sens, et les débats engagés par lui à ce sujet - ainsi, lorsqu’il déclarait que les variations biologiques au sein de l’espèce humaine étaient minimes (Vâsettha Sutta [4]).
Ceci étant, en ce domaine comme en tous les autres, le Buddha cherchait plus à persuader qu’à convaincre, et encore moins à vaincre (Assallâyana Sutta [5]).
Enfin, le Buddha non seulement s’est attaqué aux préjugés sociaux et raciaux de castes, mais il a également permis la création du premier ordre connu de moniales. Certaines de celles-ci enseignaient aux hommes, et le Buddha ne cachait pas sa haute appréciation de leur intelligence. Une attitude pour le moins extraordinaire quand on se replace dans le contexte culturel, très fortement patriarcal, de la société où il évoluait ! Mais comme on l’a dit, l’homme Gautama lui-même, fondateur de la première religion universelle, était extraordinaire.
Au vu de ce qui précède, on peut très bien considérer le Buddha comme le premier grand maître historique en matière de justice sociale, ou de ce qui, depuis une célèbre déclaration fille de la Révolution française, est désigné de nos jours sous le vocable général de “droits de l’homme”.
Notes et extraits du Sutta-Pitaka :
[1] “Ce n’est pas par sa naissance que l’on est un être inférieur ou supérieur, c’est par ses actes qu’on le devient.” - Vasala Sutta, “Sermon sur l’Inférieur social”, Sutta-Nipâta I, 7, Khuddaka-Nikâya. (lien -> binome2a)
[2] “Un vrai sauvage se reconnaît par cinq défauts. Il ne comprend pas et ne sait pas être déterminé. Il ne pratique pas les vertus. Il se complaît dans les superstitions de toutes sortes, recherchant la magie et les envoûtements. Et il croit en ceux-ci, au lieu de reconnaître les relations psychologiques et physiques de causes à effets. Il préfère flatter de ses dons ceux qui ne le méritent pas, plutôt que d’aider par ses dons les membres de la Congrégation.” - Candâla Sutta, “Sermon sur le Sauvage”, Anguttara-Nikâya V.175 (lien -> binome2b)
[3] “Le noble est au-dessus de tous ceux qui prennent comme référence leur lignée ; mais celui qui est doté de savoir et de vertu, celui-là est supérieur parmi tous les humains comme parmi les dieux.” - Ambattha Sutta, “Sermon à Ambattha”, Dîgha-Nikâya 3 (lien -> binome2c)
[4] “À la différence de la plupart des plantes et des autres animaux, les variations biologiques au sein de l’espèce humaine sont si minimes que l’on peut les considérer comme largement conventionnelles.” - Vâsettha Sutta, “Sermon pour Vâsettha”, in Majjhima-Nikâya 98, et in Sutta-Nipâta III, 9, Khuddaka-Nikâya (lien -> binome2d)
[5] Il est possible à chacun de devenir vertueux et de bonne composition. La pureté effective se définissant par un état d’esprit et des actes réels, elle est accessible à chacun, en dehors de toute contrainte de caste. - Assallâyana Sutta, “Sermon à Assallâyana”, Majjhima-Nikâya 93 (lien -> binome2e)
Source: http://www.buddhaline.net/Le-Buddha-un-pionnier-des-droits
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